Abbaye de Lagrasse

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Vue de l’abbaye et du village depuis le clocher-tour

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Ruelle du village de Lagrasse

Placé au coeur d’un paysage de l’Aude en forme de cirque naturel, le village de Lagrasse est calme. L’abbaye de Sainte Marie d’Orbieu encore plus. Une rivière bordée de galets polis par les caresses de l’eau glisse entre lui et elle comme un ruban de flots légers que deux vieux ponts enjambent. Au loin, l’horizon préservé est digne d’un univers de santons, les moulins inclus. Le mois de mai fait éclore les pavots,les valérianes,les plantes des rues et des murs.Les figuiers portent déjà des fruits verts à côté d’acacias aux grappes ivoirines.Dans les ruelles, des grilles abandonnées invitent à contempler des jardins secrets où les chats réfléchissent. Les vieilles halles abritent des bancs de pierre où se sont assises des générations de marchands, de lavandières et de bambins secouant leurs jambes dans les airs.

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Les vieilles halles du village de Lagrasse

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L’entrée de l’abbaye de la Mère de Dieu

Il est doux de se promener ici jusqu’à la grille encadrée de puissants lauriers-rose de l’une des plus anciennes abbayes mariales (fondée par Charlemagne en 790): l’abbaye de la Mère de Dieu. L’austère église a été transformée au cours des siècles avec la sobriété de la Réforme Mauriste vers 1666, les destructions de la Révolution qui chassent les religieux en 1793, les aménagements divers et variés des particuliers et des communautés du XIXe et XXe siècle (tour à tour hospice, maison de retraite, maison de la communauté nouvelle de la Théophanie qui abritait 120 personnes, etc…) jusqu’à la courageuse restauration entreprise par les chanoines de la Mère de Dieu en 2008 (voir notamment http://www.abbayedelagrasse.com.)

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Le cloître de l’abbaye de Lagrasse

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Le jardin de l’abbaye de Lagrasse

Ici la pierre blonde emprunte au sable sa couleur ocre et dorée. Le cloître aux colonnes de grès rose flammé murmure des prières à l’oreille du puits et les buis encadrés d’arbousiers se dressent avec vigueur en écoutant le son des pas marteler le pavé. Un bel escalier subsiste miraculeusement depuis le 17e siècle dans la lumière d’une salle parfaitement proportionnée. On dit que si l’on retire une seule de ses marches il s’effondre! Ensuite c’est l’entrée dans la chapelle au chevet plat qui est connue pour être la première église carolingienne (800). L’orgue chante la Pentecôte qui rassemble les jeunes chanoines en blanc autour de l’autel. Quand la lumière traverse les vitraux et qu’elle se mêle aux brumes de l’encens on dirait qu’un nuage mystique enveloppe le chœur tandis que le latin répond à la majesté du lieu. L’essentiel devient soudain visible : la paix, l’harmonie, la nature et les hommes réconciliés. Le très aimable et très cultivé Père Abbé Emmanuel-Marie, en bel habit blanc, nous guide et nous fait visiter le paisible domaine dont il a la charge matérielle et la charge spirituelle. En sortant dehors, vers la clôture, surgit soudain un transept en ruine à l’ombre de la tour-clocher Philippe de Lévis couronnée d’ une flèche-fantôme étêtée par la Révolution.

Enfin le jardin du monastère restauré par Chantal Dauchez, s’inspire des hortus conclusus médiévaux avec une divisions en quatre carrés principaux (Le Labyrinthe de l’Aabbé, Le Jardin de Saint Joseph, Le Jardin de la Vierge, Le Jardin des Saints ) riches de plantes symboliques, de fleurs vertueuses et d’odeurs délicieuses qui s’inspire de la botanique d’une Hildegarde de Bingen et des enluminures du Moyen-âge

C’est dans ces lieux que l’âme sent son existence dans toute la splendeur de sa vérité comme si le chaos des villes endormait sa conscience au chloroforme et que la campagne et son parfum mystique la réveillait soudain. Le psaume des oiseaux dialogue avec celui du vent. Les cyprès du cimetière renaissent chaque jour en puisant leur force dans le terreau des morts. Lagrasse est un humble présage de résurrection dans la simplicité séculaire de l’attente.

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Pentecôte à Lagrasse

G.L.S.G. le 19 mai 2013